Décisions préalables au partage

Il faut considérer plusieurs éléments avant de conclure une entente relative au partage des biens en raison de la rupture d'union d'un couple ou de présenter une demande à la cour à ce sujet.

Le Code civil du Québec, le Règlement sur les régimes complémentaires de retraite et le Règlement sur les régimes volontaires d'épargne-retraite imposent des contraintes quant à la façon de partager et au montant à remettre à l'ex‑conjoint ou à l'ex‑conjointe. Pour éviter les mauvaises surprises, il importe de connaître ces contraintes.

De plus, le partage à parts égales des droits accumulés dans un régime de retraite n'est pas toujours la solution la plus appropriée. Les conséquences de ce partage doivent être évaluées soigneusement.

Limite de 50 % des droits

Ex-conjoints mariés ou unis civilement

Le Code civil du Québec prévoit que la personne participante ne peut remettre à son ex-conjoint ou ex-conjointe plus de la moitié de la valeur totale de ses droits, et non la moitié de la valeur des droits accumulés durant le mariage ou l'union civile, tels qu'ils ont été établis à la date à laquelle les biens ont été évalués (généralement, à la date de l'introduction de l'instance ou à la date de la fin de la vie commune).

La limite s'applique sur la valeur totale de l'ensemble des droits accumulés par la personne participante dans des régimes complémentaires de retraite et des régimes volontaires d'épargne‑retraite, si elle participe à plus d'un. Elle se calcule à partir du montant prévu dans l'entente sur le partage des biens ou dans le jugement, donc sans tenir compte des intérêts qui s'ajouteront.

La limite s'applique uniquement à l'égard du partage du patrimoine familial. Il n'y a pas de limite lorsque le régime de retraite est partagé pour un autre motif.

Ex-conjoints de fait

La Loi sur les régimes complémentaires de retraite et le Règlement sur les régimes volontaires d'épargne-retraite prévoient que les conjoints de fait ne peuvent convenir de partager plus de la moitié de la valeur totale des droits accumulés par la personne participante.

Cette limite se calcule à partir du montant prévu dans l'entente, donc sans tenir compte des intérêts qui s'ajouteront. Contrairement aux conjoints mariés ou unis civilement, cette limite doit être respectée pour chaque régime de retraite auquel participe la personne.

Intérêts sur les montants

En plus de la somme prévue dans le jugement ou l'entente, l'ex-conjoint ou ex-conjointe recevra les intérêts qui s'appliquent, même si le jugement ou l'entente ne le mentionne pas.

Ce versement d'intérêts est prévu par le Règlement sur les régimes complémentaires de retraite et le Règlement sur les régimes volontaires d'épargne‑retraite.

Les intérêts sont calculés à compter de la date de l'évaluation des biens (généralement, la date de l'introduction de l'instance ou la date de la fin de la vie commune), jusqu'à la date à laquelle l'argent sera transféré au nom de l'ex-conjoint ou ex‑conjointe.

Taux utilisés pour calculer les intérêts

  • Épargne sous forme de capital (droits en capital) : le taux de rendement obtenu sur les placements. Si le taux de rendement est négatif, la somme qui doit être remise à l'ex-conjoint ou ex-conjointe sera diminuée de ce taux.
  • Épargne sous forme de rente (droits en rentes) : le taux utilisé par l'actuaire pour évaluer les droits.

Il est inutile, et parfois illégal, de fixer la date d'évaluation des droits à la date du jugement afin que l'ex-conjoint ou ex-conjointe reçoive exactement la moitié des droits de la personne participante à cette date, puisque ces règlements ont justement prévu l'ajout obligatoire d'intérêts pour faire en sorte que l'ex-conjoint ou ex-conjointe ne subisse pas de pénalité en raison du temps écoulé avant qu'il ou elle puisse recevoir son argent.

Immobilisation de la somme à remettre

Comme un régime de retraite vise à procurer un revenu à la retraite à une personne participante, les sommes accumulées ne peuvent généralement être utilisées que pour la retraite. C'est ce qu'on appelle « l'immobilisation ».

À moins de circonstances exceptionnelles, les sommes immobilisées pour la personne participante le sont également pour l'ex-conjoint ou ex-conjointe. Ce dernier ou cette dernière ne devrait donc pas compter sur cet argent pour acheter une nouvelle maison, par exemple.

Si les sommes sont immobilisées, l'administrateur du régime procédera au partage en transférant la somme à laquelle l'ex-conjoint ou ex-conjointe a droit dans un instrument de transfert autorisé de son choix.

Si les sommes ne sont pas immobilisées, l'ex-conjoint ou ex-conjointe pourra recevoir la somme qui lui revient en argent comptant ou la transférer dans un instrument de transfert autorisé de son choix.

L'argent reçu comptant est imposable. Le transfert permet généralement de reporter l'imposition.

Il revient à l'ex-conjoint ou ex-conjointe de choisir, selon le cas, s'il ou elle désire un paiement en argent ou un transfert. Dans ce dernier cas, la personne doit choisir l'instrument dans lequel elle désire que l'argent soit transféré ainsi que l'établissement financier où elle souhaite qu'il le soit.

Cas où les sommes sont immobilisées

Toutes les sommes provenant d'un régime complémentaire de retraite ou d'un régime volontaire d'épargne-retraite sont immobilisées, sauf dans les cas qui suivent.

Cas où les sommes ne sont pas immobilisées

  • Sommes provenant du compte non immobilisé d'un régime de retraite simplifié (RRS) ou d'un régime volontaire d'épargne‑retraite (RVER).
  • Sommes qui ne seraient pas immobilisées pour la personne participante, par exemple, cotisations volontaires que la personne participante a versées dans un régime complémentaire de retraite (RCR) et qui n'ont pas été converties en rente.
  • Ex-conjoint ou ex-conjointe qui ne réside plus au Canada depuis au moins 2 ans.
  • Somme à recevoir (capital + intérêts) inférieure à 20 % du maximum des gains admissibles (MGA) pour l'année au cours de laquelle la demande de partage est présentée, soit 13 700  $ en 2024. Le MGA est établi conformément à la Loi sur le régime de rentes du Québec.

Conséquences du partage sur les revenus de retraite

Que la personne participante soit retraitée ou non, les ex-conjoints ne partagent pas un montant de rente, mais une somme représentant la valeur de cette rente.

Conséquences sur la sécurité du revenu

Les droits en rentes permettent de connaître à l'avance le revenu que l'on pourra tirer à la retraite. Ils offrent une meilleure sécurité financière que les droits en capital. En les partageant, la personne participante voit sa rente diminuée, et son ex-conjoint ou ex-conjointe n'acquiert pas une rente, mais un capital. Il est souvent possible de limiter cette perte de sécurité financière.

Exemple

Deux conjoints participent à un régime à prestations déterminées. La valeur des droits accumulés d'un des conjoints est de 100 000 $, tandis que celle de l'autre est de 140 000 $.

Si chacun remet la moitié de la valeur accumulée dans le régime à l'autre, chacun perdra une bonne partie de sa rente et obtiendra un capital.

Si un des conjoints remet 20 000 $ à l'autre, soit la moitié de la différence de valeur entre leurs droits accumulés dans le régime, un des conjoints gardera sa rente intacte et celle de l'autre sera diminuée d'un montant bien moindre.

Conséquences pour la personne  retraitée

Si la personne participante est retraitée et qu'elle remet la moitié de la valeur de sa rente à son ex-conjoint ou ex-conjointe, sa rente sera diminuée de plus de 50 %.

De son côté, son ex-conjoint ou ex-conjointe ne recevra pas une rente du régime de la personne qui y participe. L'ex-conjoint ou ex-conjointe recevra une somme d'argent qu'il ou elle pourra utiliser pour obtenir un revenu de retraite. Le revenu de retraite que cette personne pourra obtenir avec cette somme dépendra de plusieurs facteurs, qu'elle devrait évaluer avec un ou une spécialiste de la planification financière.

Références juridiques

Haut de la page